A moins que vous n’ayez passé les dix dernières années coupés du monde, vous n’avez pas pu passer à côté de la montée en puissance des influenceurs et blogueurs mode.
Pourtant cette pratique qui consiste à immortaliser ses tenues quasi quotidiennement n’a rien de si nouveau que ça…
Car oui, le premier blogueur mode s’appelle Matthäus Schwarz et a vécu il n’y a pas moins de… cinq siècles! Si si.
Une passion invétérée pour les vêtements
Matthäus Schwarz est né à Augsbourg en Allemagne en 1497 ( il est décédé en 1574 à 77 ans).
Issu d’une famille de charpentiers, Matthäus Schwarz est cependant devenu comptable.
Mais ce qui nous intéresse surtout, c’est la passion dévorante qu’il vouait aux vêtements. A la Renaissance, seule la noblesse s’intéressait à la façon de s’habiller parce que le vêtement servait en premier lieu à montrer son rang social.
D’ailleurs n’étant pas aristocrate, Matthäus Schwarz n’avait pas le droit de porter certains vêtements réservés à la classe supérieure. Par exemple, seule la noblesse avait l’autorisation de porter du velours.
On nomme ces interdictions « les lois somptuaires ». Elles réglementaient tout ce qui relève de l’apparat que ce soit les vêtements, le mobilier et même l’alimentation.
M. Schwarz devra composer avec les lois somptuaires jusqu’en 1541, date à laquelle il est anobli par Charles Quint.
Matthäus Schwarz : auteur du premier « livre de mode »
Son amour pour les vêtements était tel qu’il lui valu un surnom : “Kleidernar” ce qui signifie « le dingue de fringues ».
Pour immortaliser ce qu’on appelle aujourd’hui l’ « outfit of the day », il commanda de nombreuses aquarelles pour le représenter à différents moments de sa vie et dans différentes tenues.
Et tout comme pour un blog de mode, il notait des commentaires sur les gravures comme par exemple « trop gras ».
Ces illustrations le représentent de sa naissance jusqu’à ses soixante ans.
En plus d’immortaliser sa façon de s’habiller, on trouve des illustrations le représentant après un accident, et même des représentations nues de dos et de face réalisées à l’âge de 29 ans (considérées comme les plus anciennes représentations d’homme totalement nu dans le Nord de l’Europe, car bien sûr on pense également à l’Homme de Vitruve de Léonard de Vinci en 1490).
Ayant commandé 101 dessins en 40 ans, Matthäus Schwarz les rassembla sous forme d’ouvrage regroupé en deux manuscrits : Trachtenbuch – « Livret des vêtements » .
Un ouvrage majeur pour l’histoire du costume
Malheureusement très peu connu du grand public, le « Livret des costumes » (on l’appelle également comme cela) est une base de documentation immense sur le costume de la Renaissance.
L’importance de cet ouvrage a été reconnue dès le siècle suivant. Matthäus Schwarz l’avait réalisé dans l’optique de fournir un témoignage sur son époque, mais pas de le diffuser. Il n’y avait donc que les deux exemplaires d’origine jusqu’en 1704, date à laquelle on fit réaliser une copie afin de conserver cette part d’Histoire.
Comme quoi le concept de blog de mode, bien que sous une forme différente, était déjà présent en 1520.
